dimanche 7 janvier 2018

CAPTAIN AMERICA #697, de Mark Waid et Chris Samnee


Trois numéros après sa reprise par Mark Waid et Chris Samnee, c'est déjà la fin du premier arc narratif, Home of the Brave que signe ce 697ème épisode. Au menu : un hommage aux Chasses du Comte Zaroff de Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel (1932) et un dénouement renvoyant à un événement mythique concernant Captain America !


Steve Rogers dispute une partie de billard avec une jeune femme dans un bar. Il loge les trois billes restantes d'un seul coup et remporte la mise. Sa concurrente le félicite en lui serrant la main. Mais il se rend compte qu'elle vient de l'empoisonner en le piquant et perd connaissance.


A son réveil, Rogers est vêtu de son costume et Kraven le chasseur le toise avec mépris dans un hall de son château, le tenant à bonne distance grâce au collier électrique qu'il lui a posé. Le bouclier du héros orne le mur déjà couvert de trophées. Kraven veut se mesurer à lui dans une chasse à l'homme.


Pour y contraindre Captain America, le chasseur a un argument imparable puisqu'il menace la vie d'un otage dans son parc. Le vengeur étoilé va aider l'innocent, David Cotter, étudiant à la Virginia Tech, et l'entraîne au loin.


Ils traversent ensemble une forêt grouillant de serpents, puis cherchent à grimper un massif rocheux mais Cotter provoque un éboulement accidentellement. D'autres pièges se dressent sur leur route en direction de l'océan voisin jusqu'à ce qu'ils atteignent un champ. Captain America précède l'étudiant qui marche alors sur une mine et s'immobilise.


En essayant de déterrer le piège, Captain America comprend que Cotter est un complice de Kraven qui resurgit alors pour l'abattre. Il évite son tir de carabine, récupère son bouclier mais Kraven refuse d'admettre sa défaite et l'entraîne dans sa chute d'une falaise. Une fois à l'eau, Captain America est surpris par l'apparition d'un sous-marin à bord duquel se trouvent les hommes du Rempart (voir #695) qui braque sur lui un canon dont le rayon l'enferme dans un bloc de glace !

Si l'on est mal disposé ou blasé, la réussite encore une fois exemplaire de cet épisode fera lever les yeux au ciel, mais comment ne pas être conquis devant tant de brio ? C'est une nouvelle leçon de narration que nous livrent le duo Waid-Samnee dont la complicité semble sans limites.

Depuis qu'ils ont repris les rênes de la série, en envoyant son héros sur les routes de l'Amérique profonde, en quête de réponses sur son image de représentant de la patrie, suite aux événements de la saga Secret Empire, on pouvait penser que ce road trip occuperait les lecteurs jusqu'au numéro 700, après quoi s'opérerait un tournant par le biais d'un rebondissement dramatique. Mais cette routine attendue ne colle pas avec l'énergie du scénariste et de son dessinateur.

En vérité, cela n'est guère étonnant qu'ils aillent si vite en besogne tant le rythme a été soutenu depuis trois épisodes. Pourquoi freiner alors ? Et, plus encore, pourquoi changer ce qui a si bien réussi dans les précédents efforts communs de Waid et Samnee dans Daredevil et Black Widow ? Waid, en particulier, aime surprendre le public en donnant à ses héros des adversaires inattendus, de telle sorte qu'on ne sache pas qui va gagner (même si les conventions incitent évidemment à penser que la vedette du titre remportera la victoire). Plus familier de l'univers de Spider-Man, Kraven défie ici Captain America.

L'histoire cache cependant bien son jeu, sur plusieurs plans : le mobile du méchant ne se résume pas à la chasse à l'homme à laquelle il contraint le vengeur étoilé, tout comme le rôle de l'otage sur lequel veille Captain America n'est pas si innocent, et le dénouement aboutit à un surprise vraiment étonnante. Voici Steve Rogers à nouveau prisonnier d'un énorme bloc de glace, comme celui dans lequel il passa plus de quinze ans entre la fin de le seconde guerre mondiale et son réveil en 1963 quand les Avengers le découvrirent.

Samnee imprime un telle dynamisme au découpage que Waid réduit ses dialogues au minimum, moins par paresse que pour faire du silence un élément angoissant supplémentaire dans le domaine truffé de pièges et de menaces de Kraven. Le dessin clair, expressif, constamment lisible, nous immerge dans l'action, nous transporte dans ce paysage et participe à nous faire vibrer.

Le génie de Samnee s'exprime parfaitement quand il s'agit d'alterner les distances dans des compositions très simples : ainsi Kraven est-il le plus souvent montrer de loin, silhouette minuscule mais bien présente et dangereuse, alors que Captain America et son compagnon d'infortune sont cadrés de plus près pour qu'on lise toutes leurs émotions sur leurs visages, dans leurs attitudes. Lorsqu'à la fin, le chasseur et sa proie sont réunis, la valeur des plans restaure leur égalité visuelle, la partie est finie, ne subsiste plus que le duel.

Waid en profite alors, dans les ultimes pages, pour boucler la boucle en ramenant dans le champ l'organisation suprématiste du Rempart, apparue dans le #695. L'avenir, sans doute très proche, nous dira si ce groupuscule a le charisme nécessaire pour former une menace d'envergure suffisante, ou s'il ne s'agit que d'un ersatz d'une formation néo-nazie déjà existante : il semble néanmoins qu'en l'inventant, le scénariste a voulu éviter, avec bon sens, de mettre en scène l'Hydra, manière de rompre avec Secret Empire (tout comme, au début de son run sur Daredevil, il avait neutralisé plusieurs clans criminels convoitant un même bien détenu par le justicier aveugle).

La suite s'annonce en tout cas très prometteuse, confirmant que la série s'est imposée comme la plus attractive de l'ère "Legacy" (au point d'ailleurs que Waid et Samnee devraient continuer à l'animer plus longtemps que prévu).

*
On trouvera, après le dénouement, un page supplémentaire, dessinée par Leinil Yu avec Wolverine. Marvel a décidé d'orchestrer le retour du mutant de manière très dosée, en le faisant apparaître dans diverses séries, à la manière des scènes post-générique de fin de ses films (sans doute en prévision d'une future nouvelle série Wolverine). Le procédé est curieux mais inoffensif. Ici, il s'intègre sans problème (quand bien même le style graphique tranche avec celui de Samnee) grâce à l'apparition de Wolverine qui cherche Rogers alors que celui-ci vient juste d'être piégé.
   

Le griffu est attendu dans les pages des prochains épisodes d'Amazing Spider-Man et The Mighty Thor entre autres pour ceux que ça intéresse...

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