jeudi 2 novembre 2017

KINGSMAN : SERVICES SECRETS, de Matthew Vaughn


J'ai bêtement raté la suite de Kingsman : Services Secrets, Le Cercle d'Or, récemment sortie en salles (et à nouveau couronné d'un beau succès). Pourquoi ne pas revoir le premier volet en guise de consolation alors ? En avant ! Partons sur les traces d'espions bien plus rigolos que James Bond !

Harry "Galahad" Hart (Colin Firth)

Lorsque Harry "Galahad" Hart vient à l'aide de Gary "Eggsy" Unwin, un petit délinquant anglais arrêté par la police après avoir volé une voiture, il le fait car il est redevable à cet adolescent dont le père était un super espion comme lui, au service de l'organisation "Kingsman", tué en mission dix-sept ans plus tôt au Moyen-Orient. 

Harry "Galahad" Hart et Gary "Eggsy" Unwin (Colin Firth et Taron Egerton)

Hart propose alors à "Eggsy" de suivre une formation d'espion car il devine son potentiel. N'ayant rien à perdre, et déjà fort d'une expérience militaire, l'adolescent intègre une troupe de jeunes recrues, dont il est le seul issu d'un milieu défavorisé mais où il se lie d'amitié avec la seule fille, Roxy, aussi déterminée que lui. 

"Eggsy", Harry "Galahad" Hart et Richmond Valentine (Taron Egerton, Colin Firth 
et Samuel L. Jackson)

Richmond Valentine, un excentrique milliardaire, enlève au même moment le professeur James Arnold pour qu'il l'aide à perfectionner une carte SIM pour téléphone cellulaire, qu'il offre gratuitement à la population mondiale, et grâce auxquels il pourra provoquer des accès de folie furieuse entraînant des bagarres gigantesques - tout ça dans le but de résoudre la surpopulation mondiale !  

"Galahad" et "Eggsy"

Après avoir interrogé brutalement le Pr. Arnold, Hart est hospitalisé pendant un bon moment et de nouvelles disparitions de hauts dignitaires s'enchaînent : contre leur contribution financière, ils seront mis à l'abri par Valentine pour devenir la nouvelle élite d'un monde dépeuplé. "Eggsy", quant à lui, franchit avec succès les étapes successives de son entraînement jusqu'à arriver en finale avec Roxy. Il échoue alors au dernier test et est renvoyé tandis que Hart est rétabli. 

"Galahad"

Devinant que son protégé va retomber dans ses travers passés, Hart prend sur lui de l'emmener au Kentucky où, d'après "Merlin", le technicien en chef du "Kingsman", Valentine va expérimenter son infernal dispositif dans une église dont le prêtre prédit une apocalypse imminente devant ses paroissiens fanatiques. Hart se mêle aux ouailles, surveillées à distance par Valentine, qui leur ordonne de supprimer l'espion. Au prix d'une spectaculaire tuerie, il en réchappe mais le milliardaire l'attend à la sortie et l'exécute froidement. "Eggsy", qui a assisté à toute la séquence de loin, demande à Chester "Arthur" King, le patron du "Kingsman" de le réintégrer pour venger Hart, mais il découvre que son supérieur est complice de Valentine et le neutralise. Avec l'aide de "Merlin" et Roxy, "Eggsy" doit désormais empêcher le milliardaire fou de forcer l'humanité à s'entre-tuer. 

"Gazelle" et Valentine (Sofia Boutella et Samuel L. Jackson)

Grâce à un implant prélevé sur "Arthur", "Merlin" localise la base secrète de Valentine tandis que Roxy s'envole pour l'espace afin d'y détruire un satellite de Valentine, qui permettra de saboter ses communications avec les téléphones cellulaires piégés. "Eggsy" infiltre le repaire de l'ennemi et affronte Valentine dans un duel à mort pour la survie de l'humanité.  

"Eggsy"

Devenu désormais le digne remplaçant de feu son père et successeur de Hart, "Eggsy" retourne auprès de mère et de sa demi-soeur qu'il peut sauver des griffes de son nouveau compagnon, alcoolique et violent, en lui infligeant une bonne raclée.

Speed & Tweed : tels sont les ingrédients de ce cocktail jouissif de l'adaptation de la déjà savoureuse mini-série en bande dessinée écrite par Mark Millar et Matthew Vaughn et mise en images par Dave Gibbons

Millar, scénariste à succès chez DC Comics puis Marvel, a parallèlement à ses travaux de commande bâti sa propre collection de comics, le "Millarworld", dans laquelle il s'amuse avec revisiter les genres qui le divertissent (le swashbucklin' space opera avec Starlight, l'aventure galactico-familial avec Empress, la fantasy post-mortem avec Reborn...). Initialement intitulé The Secret Service, ce récit dynamitait les clichés attachés aux films d'espionnage.

En respectant cet esprit de recyclage impertinent mais d'abord divertissant, Matthew Vaughn marche à la fois dans les pas de Guy Ritchie qui avait produit deux Sherlock Holmes survitaminés (avec Robert Downey Jr. et Jude Law) et de ses précédents efforts cinématographiques, dont il réutilise des ficelles (la mise en scène et le montage nerveux de Layer Cake, l'esprit cartoony de X-Men : Le Commencement ou la démesure barbare de Kick-Ass - déjà adapté de Millar).

On pourrait donc redouter que tout cela ne tourne un peu rond, voire que cela ressemble au serpent qui se mord la queue, si ce n'était fait avec un humour ravageur. Kingsman : Services secrets apparaît en vérité comme une recharge presque surnaturelle tant elle est excessive des classiques qu'elle cite, souvent sur un mode farceur (le chien confié à "Eggsy" baptisé "J.B." - "Comme James Bond ou Jason Bourne ?" lui demandera "Arthur") ou malicieux (les allusions aux poncifs narratifs dans le premier dialogue entre Hart et Valentine, insistant sur la qualité du méchant mais aussi les sarcasmes attendus lorsque le plan de ce dernier est découvert par le héros). 

Ces références-là parleront à tous car elles sont populaires. Mais Vaughn en ajoute d'autres, plus cinéphiles : en disposant du génial Michael Caine dans son casting et en habillant le flegmatique Colin Firth (excellent dans ce contre-emploi de super-espion) comme Harry Palmer (incarné justement par Caine dans Ipcress : Danger immédiat), en surnommant tous les agents du "Kingsman" comme les chevaliers de la table ronde (ce qui peut être compris littéralement mais aussi comme un clin d'oeil au Sacré Graal ! des Monty Python, tant le délire s'invite dans l'aventure), en donnant à Mark Hamill le rôle d'un professeur sacrifié (une sorte de Jedi ayant servi le côté obscur de la Force, soit Richmond Valentine, à l'inverse de son personnage de Luke Skywalker dans la saga Star Wars).

Le film abonde en morceaux de bravoure complètement cinglés, même si leur accumulation associée à la longueur conséquente du métrage (130 minutes quand même) frôle l'overdose : on y assiste à une "entre-tuerie" hallucinante dans une église, au massacre des complices de Valentine (avec des têtes qui explosent jusqu'à figurer un feu d'artifices !). Et toute l'histoire est traversée par cette incroyable tueuse qui porte des prothèses tranchantes aux jambes, créature monstrueuse et grotesque à la fois (jouée par la française Sophia Boutella), aux ordres de son ridicule chef dont la dangerosité est mise à mal par son zézaiement (Samuel L. Jackson en roue libre). Taron Egerton a bien du mérite pour composer avec un tant soit peu de mesure, alliant charme insolent et étonnement constant, un apprenti au milieu de cette galerie de dingos.

Bien entendu, on pourra trouver débile ce carnaval pop, violemment graphique, limite psychédélique, mais cette combinaison de comédie et de brutalité produit aussi un sentiment irrépressiblement électrisant : la manière dont le cinéaste assume ses excès décomplexe le spectateur de les apprécier.   

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