lundi 2 octobre 2017

WOLVERINE #7-10, de Chris Claremont, John Buscema, Bill Sienkiewicz et Gene Colan


Je reprends la critique du contenu du pavé Marvel Epic Collection : Wolverine avec le détail des épisodes 7 à 10, les derniers écrits par Chris Claremont, toujours accompagné par John Buscema désormais encré par lui-même puis Bill Sienkiewicz et suppléé, pour un numéro, par une autre légende, Gene Colan.


Nous avions laissé Wolverine surpris par Baran, prince de Madripoor, au terme de la bataille qui opposait d'un côté les amis du mutant - Tyger Tiger, Jessica Drew et Lindsay McCabe - et ses ennemis - le général Coy et ses sbires, Roughouse et Bloodsport - pour le contrôle du crime organisé dans le bas-fonds de la principauté. 
Les deux parties conviennent d'un cessez-le-feu fragile mais le prince Baran semble plutôt prendre parti en faveur de Tyger quand il reconnaît Lindsay McCabe dont il était un admirateur lorsqu'elle était actrice à Hollywood. 
Cependant, les ennuis de Coy alarment ses complices américains qui envoient à Madripoor Joe Fixit pour régler la situation.


Joe Fixit ? En vérité, il s'agit de Hulk qui, à cette époque, voit ses pouvoirs altérés  : Bruce Banner a appris à maîtriser ses accès de colère qui le transforment en monstre, désormais le colosse ne se manifeste que la nuit et garde le contrôle de ses nerfs. Par ailleurs le monstre a désormais la peau grise et non plus verte.
En qualité de négociateur, il ignore cependant les derniers événements et lorsque Wolverine/Patch apprend son arrivée sur l'île, il va s'employer, par la ruse, à dévaster le business de Coy (qui organise le trafic de drogue local). Mécontent d'avoir été (doublement - par Patch mais aussi par Berengetti, son commanditaire) dupé, Fixit quittera Madripoor résolu à ne plus servir ces hommes.

Ces deux épisodes sont jubilatoires : outre que John Buscema s'y encre lui-même (une rareté), exprimant ainsi toute la puissance de son dessin, grâce à la présence de Hulk en guest-star, le scénario de Chris Claremont étonne positivement par l'humour irrésistible qui irrigue l'intrigue.

On a trop peu vu Wolverine aussi malicieux que dans cette aventure où il s'amuse à rouler Hulk dans la farine en l'amenant à agir contre ceux-là même qu'il a été envoyé aider. Ayant reconnu immédiatement le colosse dès son débarquement à Madripoor, le griffu, qui se cache toujours sous le pseudo de "Patch" (car le monde croit Wolverine et les X-Men morts), s'emploie activement à rendre publique la véritable identité de Fixit en le poussant à bout. Cela nous vaut des scènes très drôles comme lorsque Hulk découvre sa garde-robe lacérée et remplacé par des vêtements violets (comme les pantalons déchirés qu'il porte habituellement).

Un autre moment lunaire est celui où le prince Baran dévoile à Lindsay McCabe une pièce de son palais remplie de statues à l'effigie de la jeune femme, immortalisée dans ses meilleurs rôles cinématographiques (alors qu'elle a surtout joué dans des nanars). Pendant ce temps, Jessica Drew maugréé - et j'y vois déjà quelque chose qui m'a toujours interrogé (ma théorie est que Spider-Woman est sinon gay, du moins bisexuelle, car elle a souvent été proche, au point de manifester de la jalousie, de ses amies femmes. Brian Michael Bendis semblait jouer sur cette corde aussi en montrant l'amitié très trouble entre Jessica et Carol Danvers. Marvel n'a jamais éclairci ce point, par pudeur ou frilosité, mais ça me paraît pourtant évident).

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Suit un étrange one-shot avec un épisode dessiné par Gene Colan : l'histoire est sommaire, il est question d'une ancienne vengeance promise par Wolverine à une nonne canadienne tuée par de sadiques mercenaires américains lors d'une opération en Irak des années auparavant. Aujourd'hui, ces vauriens traqués fuient dans la campagne, éliminés un par un par le mutant jusqu'au jour anniversaire de leur massacre.

L'ambiance de l'épisode doit tout à Colan et son style inimitable : le dessinateur, que tous ses encreurs avaient de la peine à encrer tant son trait était difficile à fixer, s'encre donc lui-même et livre des images puissantes, soulignant l'ambiance inquiétante, oppressante, cauchemardesque même du récit. Les visages sont déformés comme si cela était un stigmate des abominations commises par les fugitifs, et Wolverine n'apparaît pratiquement pas durant tout l'épisode - curieusement, quand il le fait, à la fin, il est dans son costume noir et jaune (mais sans masque) : peut-être le scénario ne précisait-il pas la tenue du héros et que le dessinateur l'a donc vêtu classiquement, ou alors est-ce un signe supplémentaire de la bizarrerie de l'histoire ?

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Et on termine par le dernier épisode écrit par Claremont. Avec le recul, on notera la brièveté de son run, même s'il a lancé le personnage dans ses aventures en solo dans Marvel Comics presents d'abord puis son titre dédié ensuite. Mais tout de même, pour un feuilletoniste comme lui, 10 épisodes, c'est court, quand bien même il était fort occupé par ailleurs...

Cet ultime chapitre voit aussi un changement d'encreur : Al Williamson n'est donc pas revenu après le #6, et après les deux volets encrés par Buscema lui-même, c'est Bill Sienkiewicz qui s'occupe donc de finaliser les planches du maître. Un choix étrange à dire vrai, pour plusieurs raisons : d'une part parce que "Sienk' " était déjà un dessinateur bien établi à l'époque et que le voir à ce poste est inattendu ; ensuite parce que son style tout en angles, hachures, trait fin à la plume rehaussé d'à-plats noirs rares mais profonds, tranche avec la rondeur musclée de celui de Buscema, c'est le mariage du classique et du moderne, d'un des théoriciens du dessin à la "Marvel's way" et de celui qui a révolutionné ses codes ; enfin parce qu'il ne restera pas longtemps sur le titre (7 numéros, soit jusqu'au départ de Buscema, avant l'arrivée de Byrne et le retour de Janson). Pour ma part, même si je respecte infiniment Sienkiewicz, je trouve que c'est une erreur de casting que de l'avoir associer à Buscema : c'est le choc des cultures, deux façons de faire opposées, deux personnalités trop fortes pour se combiner. Le résultat est tout sauf harmonieux, même si certains plans sont à couper le souffle, très audacieux.

L'histoire de Claremont est peu inspirée mais très nerveuse : la narration parallèle explore une bagarre passée entre Wolverine (avant qu'il ne soit pourvu de son squelette et ses griffes en adamantium, donc avant le projet "Weapon X") et Sabretooth (dont on apprendra plus tard qu'il est son père), ce dernier ayant tué Silver Fox, une indienne amie de Logan ; et, aujourd'hui, le sauvetage d'un couple de touristes imprudents dans les bas quartiers de Madripoor à la suite duquel Patch et Jessica Drew sont poursuivis par leurs agresseurs et sauvés par un inconnu invisible (mais dont Wolverine devient qu'il s'agit de Sabretooth, refusant que d'autres que lui ne tue Logan).

Ces épisodes sont également disponibles en v.o. dans le recueil Wolverine Classic, volume 2 (voir ci-dessous), et en v.f. chez Semic (dans la collection de revues "Version Intégrale") et en albums de l'Intégrale Wolverine chez Panini.

La suite et fin du run de Buscema sera écrite par Peter David dans un arc en six parties, dont je vous parlerai prochainement. Stay tuned !

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