jeudi 28 juillet 2016

Critique 962 : GRAYSON #9-10-11, de Tim Seeley, Tom King et Mikel Janin

 

DC SNEAK PEEK : SPYRAL est un prologue de huit pages à la seconde "saison" de la série GRAYSON, écrit par Tim Seeley et Tom King et dessiné par Mikel Janin, publié en Août 2015 par DC Comics.
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Dans un avion de ligne, Dick Grayson, l'Agent 37 de l'organisation Spyral, sauve Jason Jordan, le neveu de Hal Jordan (alias Green Lantern), kidnappé par les Cogloni, grâce à une manoeuvre très périlleuse.

Les scénaristes ont construit Grayson comme une série télé en "saisons" : après l'intrigue conclue au terme des huit premiers épisodes, Tom King et Tim Seeley ouvrent donc une deuxième acte à partir de ce neuvième chapitre. Comme tous les titres publiés par DC Comics en Août 2015, un prologue de huit pages lance un nouvel arc narratif, qui comptera ici trois épisodes.

Le résultat est classique mais efficace, avec une mission rapidement remplie - sauver le jeune neveu de Hal Jordan/Green Lantern de ses kidnappeurs - , et tient en une séquence spectaculaire de chute libre, impeccablement découpée par Mikel Janin.

C'est anecdotique, sommaire et sans lien avec ce qui va suivre, mais le clin d'oeil à Batman est sympa, et le ton est donné - prime au divertissement avec un super-héros espion agent double. 
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GRAYSON : NEMESIS, PART ONE-TWO-THREE sont les trois premiers épisodes du volume 3 de la série, écrits par Tim Seeley et Tom King et dessinés par Mikel Janin, publiés de Août à Octobre 2015 par DC Comics.
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(Extrait de Grayson #9.)

Dick Grayson, l'Agent 37 de l'organisation Spyral, spécialisée dans la documentation sur les super-héros et la détection-neutralisation de méta-humains potentiellement dangereux, est désormais, après la mort de Mr Minos, le précédent leader, sous les ordres de la "Matrone" Helena Bertinelli. Elle ignore qu'il agit dans le cadre d'une mission d'infiltration pour le compte de Batman, avec lequel il communique par radio sur une fréquence sécurisée sous les pseudos de "l'Ornithologue" (pour Dick) et "Mr Malone" (pour Bruce Wayne). En revanche, Grayson n'est pas au courant que son mentor est devenu amnésique suite à son dernier combat contre le Joker et qu'il a été remplacé en tant que protecteur de Gotham par Jim Gordon, même s'il se doute que quelque chose ne va pas car Batman ne répond plus à ses messages...

Des alliés de Spyral se plaignent auprès de Helena Bertinelli car plusieurs de leurs agents ont été récemment assassinés et ils soupçonnent un de ses hommes d'être le tueur. Le modus operandi désigne Grayson (les victimes ont eu le crâne défoncé par un bâton comme celui de l'ex-Nightwing, et sont tombés lorsqu'il était absent entre deux missions).
Dick est, pendant ce temps, à Madrid où il doit dérober une émeraude taillée dans de la kryptonite montée sur un collier. Helena soupçonne d'abord Tiger, l'Agent 1, d'être l'assassin qu'elle cherche et ordonne à Grayson de le distancer alors qu'il assure leurs exfiltrations.
 
(Couverture et extrait de Grayson #10.)

Seul, Dick se rend en Corse pour livrer l'émeraude au client de Spyral : il s'agit de Lex Luthor ! Refusant de lui remettre la kryptonite, il s'enfuit et gagne Rome où Tiger a été envoyé pour empêcher une tentative d'attentat. Mais il s'agit d'un piège tendu aux deux agents par le tueur.
 
(Couverture et extrait de Grayson #11.)

N'ayant pu confondre le traître assassin, Grayson, lassé des manoeuvres de Spyral, annonce à Helena qu'il quitte l'organisation.

La situation a changé sensiblement pour le héros de la série mais Tim Seeley et Tom King, qui élaborent ensemble les intrigues puis alternent à la rédaction des dialogues, continuent de creuser le même sillon que dans leurs huit premiers épisodes. L'évolution est donc subtile mais le résultat est toujours aussi efficace, d'autant plus que cet arc narratif ne compte que trois épisodes. On n'a donc pas le temps de s'ennuyer.

Le récit passe d'une piste principale - qui est le tueur d'espions qui cherche à accabler Dick Grayson ? - à des subplots plus expéditifs - le vol de l'émeraude de kryptonite, la transaction avec Lex Luthor, le traquenard à Rome. Ce cocktail d'action, de suspense, de grand spectacle et de machinations, est irrésistible et échappe en vérité aux conventions des comics de super-héros puisque les éléments les plus folkloriques en sont évacués (pas de masques, de costumes bariolés, de super-pouvoirs). Seeley et King détournent avec habileté ces codes : la double identité ici se réfère non pas à l'alias d'un surhomme mais à celui d'un agent double, les tenues moulantes ne sont pas des combinaisons en spandex mais des vêtements habillant de manière fonctionnelle des hommes de terrain, et les visages non-identifiables le sont non pas à cause de loups ou de cagoules mais par le procédé Hypnos (un système de brouillage).

Les deux auteurs travaillent donc ingénieusement le genre en en déplaçant les aspects cosmétiques pour mieux servir leur histoire. Ils s'amusent aussi avec les clichés : tous les personnages sont des gravures de mode, séduisants et athlétiques, élégants et physiquement imposants, et leurs relations sont toujours troubles. Ainsi les retrouvailles entre Dick Grayson et Lex Luthor sont savoureuses et le rappel aux événements de la saga Forever Evil (dans lequel les deux personnages s'affrontaient jusqu'à la mort de l'ex-Nightwing) est à la fois vite évoqué tout en restant compréhensible pour le profane (je n'ai pas lu Forever Evil, j'ai parfaitement saisi le contentieux entre Grayson et Luthor alors qu'il est résumé en une case ici).

Le "dossier" Nemesis se conclut en apparence mais il est clair que l'identité du traître au sein de Spyral va continuer à être exploité - il est moins important d'ailleurs de savoir qui est ce tueur que celui qui le commande.

Mikel Janin livre une prestation remarquable dans ces trois épisodes : il est aussi à l'aise dans les scènes d'affrontement, qu'il découpe de manière très vive, que dans celles où les dialogues sont mis en avant, avec une mise en scène plus classique mais soulignant leur intensité. 

Il nous gratifie aussi de plusieurs pages magnifiques où Grayson danse avec celle à qui il vole l'émeraude : tout est fait par l'artiste pour rappeler que le héros est un ancien acrobate, évoluant toujours avec une souplesse féline, l'assurance aussi d'un jeune homme sûr de son charme (à la limite de la suffisance d'ailleurs), pour qui tout semble être un grand jeu jusqu'à ce qu'il saisisse le danger qui le menace.

Parfois aussi, Janin apporte un soin particulier aux décors tout à fait remarquable, avec un niveau de détails extraordinaire (voir le poste de contrôle de la "Matrone", ou les catacombes romaines avec ces sinistres crânes empilés). Et, enfin, il compose des couvertures à la fois superbes et inventives.

Quelle série jubilatoire - et, donc, quel dommage que DC Comics ait choisi de relancer les aventures de Nightwing à l'occasion de leur récent relaunch Rebirth...   
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Ces épisodes sont disponibles en v.o. dans Grayson, volume 3 : Nemesis.
En v.f. dans la revue "Batman Univers" #1-2-3, et l'album Grayson, tome 2 : Nemesis.

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