mardi 26 mars 2013

Critique 386 : MARVEL TALES, de Alan Davis

Marvel Tales by Alan Davis rassemble l'Annual 33 de la série Fantastic Four (Septembre 2012), l'Annual 1 de la série Daredevil (Octobre 2012) et l'Annual 1 de la série Wolverine (Octobre 2012), écrits et dessinés par Alan Davis, plus la reprise d'un one-shot consacré à Thor, publiés en 2013 par Marvel Comics.
Les trois premiers récits sont connectés par une intrigue impliquant le ClanDestine, héros créés par Alan Davis.
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- Fantastic Four Annual 33 : Through a dark glass paradoxically. Sue (la Femme Invisible) et Reed Richards (Mr Fantastic) partis en vacances, le Baxter building est gardé par Ben Grimm (la Chose) et Johnny Storm (la Torche Humaine), mais ces deux-là en profitent surtout pour prendre du bon temps. Leur repos est troublé subitement par une alerte : un des engins de Reed a repéré une faille dimensionnelle. Le Dr Strange surgit alors, lui aussi inquiet par ce évènement. Les trois héros sont alors séparés dans le temps et l'espace et confrontés aux manipulations que fait subir au continuum spatio-temporel Vincent Destine. Problème : celui-ci est présumé mort, tué par son propre père qui craignait que sa puissance ne soit un danger pour l'humanité et sa famille...



- Daredevil Annual 1 : A tourist in Hell. Durant une patrouille nocturne (la même nuit où Ben Grimm et Johnny Storm ont été dérangés au Baxter building), Daredevil est intrigué par une scène de meurtre et une jeune femme télépathe présente sur place qui les mystifie, lui et les policiers. Il la poursuit à travers la ville, suivi par Dominic Destine, et découvre que Jasmine Destine traque Vincent, dont l'esprit aurait investi le corps d'un robot, semant la mort sur son passage. Le Dr Strange intervient à nouveau à la fois pour aider les Destine et Daredevil...
 



- Wolverine Annual 1 : The greater evil. Il y a bien longtemps, Wolverine a croisé la route d'Adam Destine, puis celle de Jasmine sa fille. Celle-ci l'entraîne dans un musée où Vincent Destine a entrepris de refaçonner la réalité. Samantha, Walter, Newton, Pandora et Rory ne sont pas loin derrière, tout comme le Dr Strange qui propose une nouvelle fois son aide à la famille...
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19 ans après leur première apparition et 7 ans après leurs dernières aventures, le ClanDestine fait son retour sous la plume de leur créateur, le grand Alan Davis. Ces personnages atypiques, en marge de l'univers Marvel (bien qu'intégrés à la continuité), surhumains préférant qu'on les ignore pour se préserver plutôt que d'utiliser leurs pouvoirs pour combattre le Mal, n'ont jamais eu le succès espéré par le scénariste-dessinateur britannique (il n'a pu les animer que lors de trois mini-séries, dont un crossover avec les X-Men, en tout en pour tout).
Aussi quand Marvel a offert à Davis d'écrire et dessiner les Annuals de Fantastic Four, Daredevil et Wolverine, il a saisi l'occasion de ressortir ses créatures fétiches en transformant cette commande en un projet plus ambitieux : au lieu d'imaginer trois récits distincts où les Destine joueraient les guest-stars, il a conçu une histoire en trois volets qui permettrait de résoudre une des énigmes des séries précédentes, et il a convoqué le Dr Strange (qu'il avait utilisé dans un one-shot hilarant où le sorcier suprême rencontrait Stan Lee) pour relier les parties.
Comme scénariste, Alan Davis a les défauts de ses qualités : son imagination débridé rend souvent ses récits un peu complexes à suivre, ça part dans tous les sens, et il faut vraiment attendre les ultimes pages pour que tout s'éclaircisse. Ces "Marvel Tales" ne font pas exception et sont inégales en qualité : le segment avec les 4F (ou plutôt les 2F, puisque seules la Chose et la Torche Humaine sont présents) est le plus faible même s'il est très animés. Brodant sur les voyages temporels et séparant les protagonistes rapidement, il faut s'accrocher pour ne pas perdre le fil. Par ailleurs, si Vincent Destine, le fils maudit de la lignée (dont on savait seulement qu'il avait été tué par son propre père car il était jugé incontrôlable et dangereux - un choix dramatique, étonnant dans une série mainstream et plutôt légère, qui avait divisé les autres enfants d'Adam Destine), est tout de suite désigné comme la menace, Davis sème le trouble en suggérant que c'est peut-être aussi un démon ayant pris son apparence. Les autres Destine à l'oeuvre dans ce chapitre sont Gracie et Albert et ne font que de la figuration. On a l'impression que ces 40 pages (par ailleurs très énergiquement menées) sont un peu un coup d'épée dans l'eau, et que la suite, avec les deux Annuals suivants, sera plus intéressante.
Et effectivement, avec Daredevil, le projet est déjà plus digeste. L'intrigue est beaucoup plus simple, avec une structure plus aisée (une course-poursuite ponctuée par un bel affrontement entre DD et Dominic Destine, puis la lutte finale contre le Plastoïde). En même temps, le changement de braquet qu'opère Davis est un peu abrupte qu'il peut désorienter, mais on ne va pas bouder son plaisir, d'autant que l'auteur anime à merveille ce cher tête à cornes, et surtout les Destine (au moins deux d'entre eux, Jasmine et Dominic) impactent plus l'histoire, sont plus présents à l'image.
Cependant, le bouquet final était à l'évidence réservé pour l'Annual de Wolverine, un personnage qu'a déjà écrit et dessiné Davis il y a longtemps (dans le récit complet Bloodlust) et dont il va à nouveau illustrer les aventures (avec Paul Cornell au scénario). Walter, Samantha, Newton, Rory et Pandora rejoignent Dominic tandis que Jasmine et Wolverine sont dans le feu de l'action avec Vincent (ou son avatar) se déchaîne. C'est un vrai festival, où la folie du premier épisode et le dynamisme du deuxième sont combinés. Qu'importe, presque, si le dénouement est un peu expédié et que la toute dernière image laisse planer un doute sur cette résolution : c'est jubilatoire, et l'on se dit que l'objectif de Davis est atteint avec ces trois récits pleins de rebondissements, où les Destine même un peu en retrait sont bien revenus (en attendant d'autres apparitions, voire une nouvelle mini-série ?).
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Visuellement, Alan Davis est accompagné par Mark Farmer à l'encrage et Javier Rodriguez aux couleurs. Je préfère personnellement quand Paul Neary finit les dessins, mais le résultat est quand même extraordinaire de vitalité, de puissance, avec un découpage ahurissant, des personnages expressifs, des compositions renversantes, une amplitude dans le trait comme peu de graphistes en possèdent aujourd'hui.
Et la colorisation est somptueuse, comme rarement Davis en a eu le privilège : Rodriguez (qui occupe aussi ce poste sur le Daredevil de Mark Waid) y prouve l'excellence de sa contribution, avec une palette nuancée et éclatante tour à tour. On en prend plein les yeux aussi grâce à lui.
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Un peu laborieux pour se mettre en route mais de plus en plus jouissif, avec le plaisir intact de retrouver ces personnages cultes, voilà un bel album (qui se clôt par un voyage de Thor et les trois guerriers en Egypte, où les Asgardiens ont modifié à tout jamais le célèbre Sphinx - divertissant, même si ce n'est pas indispensable).
Et, pour finir, ci-dessous, l'image composée par la réunion des trois variant covers des Annuals, formant une chouette fresque : 

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