vendredi 17 juin 2011

Critique 236 : SPIDER-MAN & BLACK CAT : THE EVIL THAT MEN DO, de Kevin Smith et Terry Dodson



Spider-Man and Black Cat : The Evil That Men Do est une mini-série en 6 épisodes écrite par Kevin Smith et dessinée par Terry Dodson, publiée par Marvel Comics, d'Août à Octobre 2002 (#1-3) et de Février à Mars 2006 (#4-6).
*
Felicia Hardy alias Black Cat accepte d'aider une connaissance à retrouver une de leurs amies, Tricia, vue pour la dernière fois en compagnie d'un acteur en vogue, Hunter Todd. Au même moment, Spider-Man commence à enquêter sur la mort par overdose d'un étudiant, Donald Phillips. Les deux anciens amants masqués se recroisent en suivant la même piste qui les mène à Garrison Klum, un riche homme d'affaires, toujours flanqué de son frère Francis. Apparemment respectables, les frères Klum fraient avec des gangsters et le trafic de drogue.
Black Cat veut arrêter Garrison Klum et s'attaque seule à lui. Elle échoue en prison après avoir été accusé du meurtre de sa cible. Spider-Man avec l'aide de Daredevil et de Diablo (des X-Men) comprend que Francis Klum est un hybride, mi-humain, mi-mutant, capable de téléporter des substances dans le corps de ses victimes et de manipuler leurs pensées. Il porte surtout un lourd secret que seule Black Cat va partager avec lui...
*
La réalisation de cette mini-série a été épique : Kevin Smith, qui s'était fait un nom comme scénariste de comics (relançant, avec Joe Quesada, Daredevil, avant que Brian Bendis ne s'en occupe) et comme cinéaste (Clerks, Dogma), en a commencée la rédaction en 2002 et l'a achevée en 2005 ! Entretemps, il a préféré se consacrer à ses films, des productions par ailleurs peu mémorables.
Dans l'intervalle, Terry Dodson (qui a gardé un très mauvais souvenir de l'expérience - on le comprend) a eu le temps d'illustrer Wonder Woman, écrit par Allan Heinberg, qui, comme Smith, a accumulé les retards (accaparé par la série télé Grey's Anatomy)!
Cette catastrophe éditoriale a abouti à une production dont la traduction en France a heureusement pris moins de temps (dans deux hors-série - #23-24 - de la revue "Spider-Man"). Pour quel résultat ?
Smith a affirmé que la version finale de son script était bien meilleure que s'il avait livré le scénario à temps en 2002. Qu'il soit permis d'en douter... Le premier acte, avec les trois premiers chapitres, est très efficace, avec les retrouvailles entre Black Cat et Spidey, la révèlation rapide de l'identité du méchant, des scènes d'action et des dialogues bien troussées : Smith s'y montre à son avantage et emballe le lecteur.
En revanche, le deuxième acte, avec les trois derniers chapitres, verse dans le mauvais mélo, avec l'évocation des viols de Felicia Hardy et de Francis Klum, et la définition des pouvoirs de ce dernier, la téléportation étendue au transport de pensée. L'entrée en scène de Daredevil n'est pas désagrèable, par contre celle de Diablo apparaît comme une grossière béquille narrative pour expliquer ce que le scénario ne peut pas éclaircir tout seul. Le tout est plombé par une interminable séquence de confessions dénuée de toute émotion et se concluant par une bagarre expédiée, sans compter un épilogue inutile (suggérant une suite qui n'est jamais venue).
Rarement, un si beau soufflet est si radicalement retombé, soulignant le temps qu'a pris Smith pour terminer son ouvrage (en y ajoutant des références au run de Daredevil par Bendis, tout à fait inutiles).
*
Dans ces conditions, le mérite de Terry Dodson est grand d'avoir réussi à maintenir une cohérence graphique à des épisodes qu'il aura dessinés avec un break forcé de trois ans. Toutefois, il faut avouer qu'après le quatrième chapitre, on a l'impression que le coeur n'y est plus et qu'il est en pilotage automatique (à sa décharge, il faut préciser que c'est aussi à ce moment-là que l'histoire cesse d'être intéressante).
C'est dommage car, au début, Dodson, artiste inégal mais capable de très bonnes choses quand il est inspiré, signe des planches magnifiques, avec un Spidey bondissant et une Black Cat pulpeuse et malicieuse comme jamais.
*
Une série qui aurait pu être fantastique, compte tenu de la qualité potentielle des exécutants, mais desservie par l'irresponsabilité d'un auteur (et d'editors trop laxistes !). Un déplorable gâchis.

Aucun commentaire: