mercredi 20 octobre 2010

Critique 173 : ULTIMATE FANTASTIC FOUR, Vol. 2 - DOOM, de Warren Ellis et Stuart Immonen

Ultimate Fantastic Four, volume 2 : Doom rassmble les épisodes 7 à 12 de la série, publiés d'Août 2004 à Janvier 2005 par Marvel Comics, écrits par Warren Ellis et dessinés par Stuart Immonen.
*
Dans l'univers Marvel classique, les 4 Fantastiques ont acquis leurs pouvoirs lors d'un vol spatial durant lequel ils ont été irradiés par des rayons cosmiques. Dans l'univers Ultimate, comme cela est décrit dans le volume 1 (The Fantastic, de Brian Michael Bendis, Mark Millar et Andy Kubert), les héros sont transformés à la suite d'une expérience scientifique ratée par la faute d'un cinquième protagoniste, Victor Van Damme, collègue de Reed Richards. D'autres différences sont notables : le groupe est reclus dans le Baxter building sous la "protection" de l'armée (comme les Ultimates, qui travaillaient avec le gouvernement dans leur base du Triskélion) et les soldats ont pour ordre de les tuer s'ils essaient de s'en échapper. Enfin, et c'est ce qui nous conduit au début de cet arc, Van Damme a disparu après qu'il ait avec Reed, Sue, Johnny et Ben, découvert la Zone Négative. Est-il mort ? Ou, s'il a survécu, a-t-il lui aussi été transformé, et comment ?
Le titre de ce volume indique que Van Damme est encore vivant et que "Doom" n'augure rien de bon pour les quatre héros, qui découvrent tout juste ce dont ils sont désormais capables...
*
Warren Ellis n'a jamais été très inspiré dans sa production Ultimate et d'ailleurs ce qu'il y a apporté a été quasiment ignoré de Bendis et Millar, les deux vrais pilotes de cet univers où le premier a oeuvré dans la longueur (plus de 100 épisodes consécutifs - série en cours - d'Ultimate Spider-Man, Ultimate X-Men, Ultimate FF) et le second dans la profondeur (Ultimates, UXM, UFF).
Ellis a de plus, c'est notoirement connu, une aversion prononcée pour les super-héros et son talent s'épanouit bien mieux dans les registres de la science-fiction, de la satire et autres récits de genre référencés qu'il bouscule avec un mélange de rudesse et d'affection (fera-t-il jamais mieux, plus personnel et efficace, que son chef-d'oeuvre Planetary, véritable condensé "ellisien" ?). Sachant cela, on entame la lecture de son passage sur UFF avec à la fois de la curiosité et de l'appréhension.
Le résultat confirme ces sentiments : l'histoire est à la fois décevante car on y sent son auteur peu à l'aise, à peine concerné par son sujet, mal à l'aise avec ses codes, et pourtant cela est traversé de scènes détonantes, parfois drôles, très toniques. Mais jamais cela ne dépasse le travail de commande provisoire.
Là où Ellis est à son meilleur, c'est dans la caractérisation : il parvient à typer un personnage en quelques lignes de dialogue, par une attitude, en n'hésitant pas à bouleverser la donne. A ce jeu, ce sont Reed et Sue qui sont les plus différents de leurs versions classiques : Sue est décrite comme la véritable leader du groupe, agressive, dominatrice (y compris dans sa relation amoureuse) ; alors que Reed apparaît comme un nerd, maladroit, cérébral, qui ne réagit que lorsque la fille qu'il aime est malmenée.
Johnny est le plus faiblement exploité par Ellis et ne varie guère de son emploi dans la version classique, un dragueur impulsif et puéril : c'est dommage qu'Ellis n'ait pas su/voulu/pu relifter ce personnage. Ben est également soumis à un régime light, même si on sent que le scénariste suggère des éléments intéressants, avec une tendance plus volontariste, moins dépressif-râleur que dans les FF classiques.
Ellis tarde également à montrer Van Damme - étrange re-nomination du Von Doom/Von Fatalis - mais il le fait avec habileté et cela donne au personnage une aura menaçante assez forte. Il lie généalogiquement le méchant à Dracula, sans en faire un vampire mais... Un hybride de cyborg et de satyre (apparence qui sera corrigée dans les apparitions ultérieures) ! Il n'a aucune pitié, mais le génie du mal profondèment enraciné, au point de vouloir vraiment tuer les Fantastiques (et pas seulement les dominer comme dans les FF classiques).
L'intrigue se déroule sur un faux rythme, à la fois assez rapide (le livre est vite consommé) et nonchalant (le face-à-face entre les FF et Van Damme n'intervient que dans les deux derniers chapitres). Entretemps, quelques séquences notables sont divertissantes, comme lorsque Reed explique à Ben que Sue veut l'examiner dans son intimité (requête vite rejetée) ou que l'équipe découvre le Fantasti-car (occasion de vanner Reed).
*
Stuart Immonen signe les illustrations et l'on sent un flottement prononcé dans son graphisme : l'artiste était alors à la croisée des chemins, délaissant son style classico-réaliste à l'oeuvre sur ses Superman et Shockrockets pour s'orienter vers le trait cartonny-délirant qui culminera lors de ses retrouvailles avec Ellis sur Nextwave.
Néanmoins, même en mode mineur, Immonen fait preuve d'une énergie irrésistible dans sa partie et spécialement dans les scènes d'action qu'il dôte d'une élégance explosive à nulle autre pareille. En comparaison avec Kubert Jr, ses planches possèdent une vigueur et une fluidité incomparables.
*
Pas vraiment indispensable, sauf pour les fans d'Immonen comme moi. Les clients d'Ellis dans la veine mainstream préféreront relire ses Thunderbolts.

Aucun commentaire: