lundi 5 octobre 2009

Critique 104 : AVENGERS - RED ZONE, de Geoff Johns et Olivier Coipel


Avengers : Red Zone rassemble les épisodes 65 à 70 du Volume 3 de la série, publiés de Mai à Octobre 2003 par Marvel Comics. Le scénario est écrit par Geoff Johns, les dessins sont signés par Olivier Coipel.
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Un nuage rouge particulièrement virulent apparaît au Mont Rushmore et requiert l'intervention des Vengeurs (composés de Captain America, la Vision, L'homme-Fourmi, Miss Hulk, la Sorcière Ecarlate, Warbird et le Valet de Coeur). Parallèlement, Iron Man et la Panthère Noire procèdent à des recherches sur ce virus mortel, mais les Vengeurs dépendant désormais de l'O.N.U. voient leurs efforts contrariés par le gouvernement américain - le Secrétaire à la Défense, Dell Rusk, en particulier.
Bientôt les héros découvrent une base secrète de l'armée US où a été conçue ce gaz toxique et où se cachent des soldats de l'A.I.M. . Au même moment, Tony Stark et T'Challa sont arrêtés et emprisonnés par l'armée. Puis Henry Gyrich, l'agent de liaison des Vengeurs, tombe avec le Faucon dans un traquenard tendu par Rusk... Qui s'avère être le terrible Crâne Rouge (en vo, Dell Rusk est un anagramme de Red Skull).
Le plan du criminel nazi est simple : il veut faire accuser le Wakanda d'être l'auteur de cet attentat biologique pour déclencher une guerre raciale. Les Vengeurs réussiront-ils à l'en empêcher en l'arrêtant tout en stoppant le nuage rouge ?

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Avant de devenir le scénariste-vedette de DC Comics, Geoff Johns avait signé cet arc des Vengeurs, précédant la révolution déclenchée par Brian Michael Bendis avec Avengers : disassembled (qui aboutira à la naissance des New Avengers).
Le récit est parfaitement accessible et très divertissant. Les Vengeurs doivent se prouver à eux-mêmes qu'ils forment une équipe capable de résoudre des problèmes concrets du monde dans lequel ils vivent : cette agression terroriste biologique est évidemment en prise directe avec les attentats du 11-Septembre et les héros sont confrontés à une menace plus insidieuse que leurs habituelles batailles.
Johns articule pourtant son récit autour d'un vilain classique, en l'occurrence Crâne Rouge, et l'aventure prend finalement une tournure "old school" qui comblera les nostalgiques de l'époque où les bons et les méchants s'opposaient, où l'intrigue s'achevait dans un duel "à l'ancienne" plein de violence et de panache (ici, la Panthère Noire, un héros noir africain, défie le fanatique nazi Red Skull). Entretemps, le scénariste nous a gratifié d'un palpitant double complot, avec d'un côté le groupe mené par Captain America dans les tréfonds d'une base aux mains de malfrats, et de l'autre une histoire d'espionnage politique avec Gyrich et le Faucon confondus par Dell Rusk.
L'interprétation que donne Johns de Crâne Rouge est judicieuse : c'est à la fois un manipulateur et un vrai lutteur, ce qui en fait un méchant vraiment menaçant, dangereux, un adversaire de taille. Crâne Rouge symbolise ainsi le système gouvernemental américain propice aux manoeuvres les plus louches en coulisses tout en (ab)usant de la force.
L'autre qualité de Johns (comme il le confirmera en écrivant la JSA) réside dans sa caractérisation des personnages héroïques auxquels il donne une vraie humanité, une singularité passionnante. "Son" Captain America est classique -un soldat valeureux, plus déçu de découvrir les éventuels secrets d'Etat qu'en colère contre les institutions, mais déterminé à "faire le ménage". En revanche, les joutes verbales entre Tony Stark et la Panthère Noire sont savoureuses : les deux hommes partagent un statut similaire (riches, très intelligents, proches des hautes sphères politiques) mais sont de fait en concurrence permanente - et T'Challa se révèle être un filou réjouissant, dôté d'un charisme qui fait regretter que ce personnage ne soit pas mieux exploité depuis (surtout qu'avec Civil War puis maintenant Dark Reign, ce fier monarque pourrait jouer un rôle décisif). Donner au Faucon un statut d' "insider" est aussi habile : le personnage apparaît par intermittences mais toujours à des moments-clés - c'est très malin et efficace.
Néanmoins, malgré tout son (immense) savoir-faire, Johns ne peut pas tout faire en 6 épisodes et c'est frustrant car on sent qu'il aurait des choses à dire et à faire avec le couple Scarlet Witch-Vision ou avec Warbird (en fait Ms Marvel, qui est nommée par George Bush Jr chef de la sécurité nationale à la fin de cet arc).
Johns parvient quand même à créer un suspense prenant, chaque fin de chapitre donnant une envie irrésistible d'avancer - ce qui n'est pas si courant.
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En outre, vous serez bluffés par la partie graphique. En effet, elle est signée du français Olivier Coipel dont on peut dire qu'il est né pour dessiner les Vengeurs tellement son style sert à merveille ses personnages et ce genre d'aventure.
Coipel possède un don fabuleux pour l'anatomie, les expressions, et le découpage : son travail est exemplaire, la lecture est d'un dynamisme et d'une limpidité remarquables, et sous son crayon les Vengeurs possèdent une séduction, un charisme que peu d'artistes restituent avec autant de bonheur.
A cet égard, la grande scène du combat final est un modèle du genre, brillante, percutante, viscérale : on sent le plaisir qu'il a eu à la mettre en images et on en retire soi-même une jubilation intense.
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Zone rouge : rouge de plaisir, vous serez ! Un authentique "must-have".

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